100 merveilleux albums de 2017 – #60 à #51

60/ The Flaming LipsOczy Mlody (pop expérimentale)

oczy mlody

Deux chansons et un passage. Lorsque Oczy Mlody cède la place à How ?? par un changement d’octave et un décalage de ton, c’est une véritable ouverture onirique qui perce la toile des rêves pour accourir vers un univers de fantasmes débridés. Cette musique capiteuse ne maîtrise presque plus les paramètres. Ceux-ci cèdent face à un lyrisme béat et titubant. Des féeries d’un autre monde s’accoquinent à des rythmiques sourdes et ondulantes tout droit issues du fond des rêves. Alors, tout se fait tangible et évanescent. Et cette orchestration de sons mystérieux et insondables forme comme un merveilleux château de cartes d’images inventées.

Une chanson : https://www.youtube.com/watch?v=vj2fNyjKmYA
Parce que des fantasmagories d’un autre monde tombent comme une pluie acide sur un sommeil impossible.

 

59/ QuicksandInteriors (rock alternatif / grunge)

interiors

Rien de nouveau sous les latitudes rock mais des plaisirs non dissimulés. Quicksand ne s’éloigne pas d’un indie rock très 90’s bercé à la fois aux grosses guitares grunge, voire post hardcore, et aux structures de pop songs, la naïveté en moins. Le chant doucereux en surplomb de lignes de guitares crée une musique à deux niveaux toujours entraînée dans des croisements fatals. S’y croisent alors des riffs savamment agencés pour déstructurer les lignes ; des riffs sur un fil tendu qui brisent la cadence des arpèges. Et de là vient le savante étrangeté d’un album qui place les attitudes calmes dans des surtensions permanentes.

Une chanson : https://www.youtube.com/watch?v=OI9FCkwAy_k
Parce que les riffs soufflent à gorge déployée sur les tisons embrasés pour mieux faire voler les flammes.

 

58/ Nadine ShahHoliday Destination (rock alternatif / post punk)

holiday destination

Nadine Shah c’est d’abord l’exécution placide d’un plan : compositions détrempées dans les températures les plus basses, voix elle-même refroidie, batterie en roulement mécanique. S’en dégage un rock fier et distant, presque hautain. Mais dans les nuées métalliques et poussiéreuses, un lâcher-prise relâche les cordages. Instruments et voix fredonnent le plaisir de la lancinance. Arpèges froids, arpèges chauds, les guitares se détendent et tutoient des températures extrêmes. C’est un travail de forge ; une alchimie savante. C’est l’art du bel ouvrage. Holiday Destination est de ces albums dont la surface abrasive n’est qu’une apparence.

Une chanson : https://www.youtube.com/watch?v=R6lNShLz9xA
Parce que cette chanson blessée en plein cœur se traîne sous une pluie de projectiles semblable à celle de The Cure mais ne vise rien d’autre que la grande percée libératrice.

 

57/ Part ChimpIV (stoner rock / noise rock)

IV

L’écho des flammes semble infini. Un stoner rock infusé aux réverbérations paralysantes de guitares lourdes et c’est toute l’aridité de la terre brûlée qui résonne. La plaine s’assèche au contact de mélodies dévastatrices. Ces guitares en surchauffe n’en finissent plus de s’auto-enflammer dans le silence brûlant et pourtant si éloquent du désert. Ne reste alors que l’ossature nue. Cet album est une entreprise de dépouillement total. Et ceux qui croisent son chemin savent qu’ils en garderont les séquelles sur leur peau brûlée.

Une chanson : https://www.youtube.com/watch?v=6b7JuF6KH2Y
Parce qu’il ne suffit que de quelques riffs qui se croisent dans des trajectoires aléatoires et brûlantes pour que cette chanson devienne une météorite hurlante.

 

56/ The MyrrorsHasta la Victoria (rock psychédélique / krautrock)

hasta la victoria

L’entrée en guerre qu’annonce une flûte mystique navigatrice n’est pas à prendre à la légère. Elle entraîne derrière une basse ondulante et frénétique. Puis un peuple armé jusqu’aux dents (Organ Mantra). Les instruments forment une danse révolutionnaire imparable. L’élan peut parfois voler en éclats dans des doutes exprimées par cordes pincées, le rock de The Myrrors a toujours une idée d’avance. L’avant-gardisme révolutionnaire par excellence. Rock psychédélique infusé à la world music, au krautrock, à l’expérimental et au free jazz, l’histoire est riche de promesses. Et cette histoire qui se narre ici est celle d’une révolution sans effusion ni affrontement ; celle qui se vit d’abord intérieurement.

Une chanson : https://www.youtube.com/watch?v=qCea9zj5m3w
Parce que la révolution se prépare patiemment avant que les flûtes claironnent sur les champs de bataille victorieux.

 

55 / DeerhoofMountain Moves (pop expérimentale)

mountain moves

Une joie qui s’électrise sans relâche en devient proprement délirante. Mountain Moves est aspergé de ce gaz fou. Des poncifs pop ramassés dans quelques accords clinquants ballottés à l’acide aiguë explosent de toutes parts. Dressée dessus, une voix cristalline s’y déhanche. Elle est seule capitaine de bord d’un bateau en plein remous (Come Down Here & Say That – et ses inspirations de pop bricolée et éthérée façon Stereolab). Le tableau final en est complètement détonnant. Grâce à cette pop bigarrée, composée de couleurs jurant entre elles, la distorsion n’est pas que musicale. Elle en est aussi chromatique.

Une chanson : https://www.youtube.com/watch?v=OECwiTm148A
Parce que plutôt que de se taire quand le son s’étouffe, se tord et se dérègle, Satomi Matsuzaki préfère au contraire commenter ses beaux reliefs entre dièse et diégèse.

 

54/ Raoul VignalThe Silver Veil (folk)

the silver veil

Des arpèges qui déboulent en bande, une batterie seulement caressée par le vent ou encore une flûte en souffle imperceptible : c’est par ce dispositif réduit au plus simple appareil que Raoul Vignal touche en plein cœur. Son jeune âge ne fait pas illusion à une voix fatiguée qui semble avoir déjà vécu, presque comme si elle s’était laissé envoûter par le spectre de Nick Drake. Parfois, des décrochages de demi-tons et des boucles déstructurées dévoilent la fragilité de l’édifice et la sinuosité du chemin. Et grâce à ces beaux croche-pattes, le folk de Raoul Vignal n’en est que plus trébuchant et poignant.

Une chanson : https://talitres.bandcamp.com/track/one
Parce que l’imperceptible douceur des doux sacrements s’entendent à travers les montées triade par triade aux octaves supérieurs.

 

53/ With the DeadLove from with the Dead (doom metal)

love from with the dead

L’heure de la sortie de caveau est venue. En jouant un doom metal pleinement macabre et crapoteux, With the Dead remonte les eaux du Styx et rejoue ainsi le mythe d’Orphée et d’Eurydice dans les tréfonds tremblants de la terre. Le voyage sera long et il ne faudra pas craindre la résurgence joyeuse des morts. Car aussi bizarre que cela puisse paraître, les danses de mort peuvent entraîner vers la joie et l’amour. Et si ce voyage n’est pas trop long pour le pérégrin, il plongera avec délice dans un morceau final de 17 minutes à la limite de l’ambient, dans cette partie du globe où la perte est totale.

Une chanson : https://www.youtube.com/watch?v=gJK7AEocCP8
Parce que s’enfoncer lentement dans la fange permet d’entendre le chant lointain et sourd des morts.

 

52/ PontiakDialectic of Ignorance (rock psychédélique / stoner rock)

dialectic of ignorance

Le rock poussiéreux et impétueux de Pontiak balaie tout sur son passage. Des élans organiques luttent contre un vent de face ; les riffs de guitare ferraillent contre une météorologie capricieuse en plein marasme guerrier. Entre rock psychédélique, drone doom, stoner rock et ambient, c’est à chaque fois l’atmosphère pesante qui s’abat comme une chape de plomb. Ce ciel si bas fait tourner des éléments dans un tourbillon massif. Et dans cette musique en ronde, une danse possédée s’abandonne. Les mots s’emportent et s’y perdent pour toujours.

Une chanson : https://www.youtube.com/watch?v=sy7leSTJZPg
Parce que ce parcours du combattant dans le désert venteux et glacé se laisser progressivement gagner par la lévitation la plus céleste.

 

51/ 36Black Soma (ambient)

black soma

Et soudain, le surgissement d’une voix céleste. Elle crée à elle seule des totems de beauté bâtis sur la terre brûlée et balayés par le vent. L’ambient de 36 est fébrile mais flambant, grésillant mais scintillant ; comme éclairé par une lumière diurne aveugle que des cris sourds percent. Cette lumière chatoie aux ondes d’un piano architecte ; ce piano passé maître dans l’art de modeler les matières mouvantes dans laquelle se lover et se noyer. Les noyades ne sont jamais des abandons définitifs. Car toute mélodie jetée dans l’océan finit ramenée par le ressac des vagues sur la plage.

Une chanson : https://3six.net/track/black-halcyon
Parce que la mer brille de mille éclats adamantins et engloutit d’un chef le monde et ses rivages tel un immense monstre d’eau.

 

Tino Tonomis

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